En 2016, l’honorable Bill Morneau, alors ministre des Finances du Canada, avait défrayé la chronique en affirmant que les Canadiens devraient s’habituer à la précarité du travail et à ce qu’il qualifiait d’emplois « mobiles ». Ses commentaires ont suscité de vifs débats publics quant à la situation de précarité de travail au Canada et à la possibilité que cette dernière devienne une réalité de plus en plus inévitable.
Les recherches sur le sujet font souvent état de la difficulté à bien définir le concept de « précarité ». Par conséquent, les estimations du nombre de Canadiens occupant un emploi précaire varient en fonction de l’étendue de la définition. Toutefois, il est généralement admis que les conditions de travail précaires se caractérisent par des facteurs tels que des salaires bas, peu ou pas d’avantages sociaux, et des emplois contractuels, saisonniers ou à temps partiel, alors que l’employé souhaiterait travailler à temps plein.
Dans un rapport de 2018 des Comptables professionnels agréés du Canada, intitulé Le travail précaire au Canada : qui sont les personnes réellement à risque?, on fait valoir que si la part globale du travail à temps partiel est demeurée à peu près stable depuis les années 1990, il y a eu des augmentations notables dans quelques secteurs clés : information, culture et loisirs; hébergement et services de restauration; et éducation. Malheureusement, les universités publiques du Nouveau-Brunswick n’ont pas été épargnées.
Il s’agit là du comble de l’ironie. Comment se fait-il que les établissements qui se consacrent à l’amélioration des perspectives d’avenir de nos jeunes offrent de moins en moins de perspectives équitables à leurs propres employés, les pédagogues de notre pays?
Malheureusement, nos universités publiques ne sont pas à l’abri de cette tendance aux conditions de travail précaires. En raison du sous-financement chronique de nos universités publiques qui subsiste depuis les années 1980, de plus en plus de professeurs et de bibliothécaires sont piégés dans des emplois contractuels à court terme ou à temps partiel pendant toute leur carrière, et cette tendance touche un nombre disproportionné de femmes et de groupes ethniques minoritaires. Ces professeurs et bibliothécaires sont privés de sécurité d’emploi, et la plupart doivent soumettre une nouvelle demande d’emploi tous les semestres pour reprendre leur poste. On les prive aussi de l’occasion de participer pleinement à la recherche et au service à l’institution qui, avec l’enseignement, forment les piliers du travail universitaire. La plupart d’entre eux ne touchent pas un salaire suffisant, et tous gagnent moins que leurs collègues à temps plein malgré le fait qu’ils s’acquittent des mêmes tâches.
La situation est lourde de conséquences, non seulement pour notre personnel universitaire contractuel, mais aussi pour les personnes étudiantes, le personnel universitaire à temps plein et l’intégrité de nos universités. Le personnel universitaire contractuel et à temps partiel est souvent aux prises avec de piètres conditions de travail, comme l’absence d’un espace de bureau pour rencontrer les personnes étudiantes. De plus, il arrive que ces employés reçoivent leurs contrats d’enseignement à peine quelques jours avant le début du semestre, ce qui ne leur laisse que peu de temps pour se préparer. La plupart d’entre eux ont beaucoup de difficulté à poursuivre leurs recherches tout en donnant un nombre élevé de cours, surtout quand ils doivent créer et donner de nouveaux cours tous les ans parce que ceux des années précédentes ont été annulés, parfois même à la dernière minute. Ils ne touchent aucune rémunération pour leurs tâches de service, comme les conseils prodigués aux personnes étudiantes ou le temps consacré au travail en comité ce qui fait en sorte qu’une grande partie de ce travail finit par retomber sur les épaules des membres du corps professoral à temps plein. Bref, la précarité du travail dans les universités publiques minent la qualité globale de nos établissements dans la poursuite de leur double mission d’enseignement et de recherche.
La Fédération des associations de professeures et professeurs d’université du Nouveau-Brunswick revendique le droit des membres du personnel universitaire contractuel à des possibilités équitables, à la sécurité et au respect dans le milieu de travail. Les établissements d’enseignement doivent montrer la voie à suivre et donner l’exemple en matière de conditions de travail justes. Il en va de la santé de nos employés, de la vigueur de nos collectivités et de la qualité des possibilités qui seront offertes aux générations futures.
Joignez-vous à la FAPPUNB lors de cette élection provinciale et demandez des universités publiques fortes – un investissement dans l’avenir du Nouveau-Brunswick.